Elisabeth Casan était convoquée ce lundi au tribunal de grande instance pour « entrave à la circulation », après avoir bloqué les poids lourds au rond-point d’Accous. Deux autres membres du mouvement anti-camions ont également rendez-vous avec la justice le 12 décembre.
Les Haut-Béarnais étaient présents en nombre, ce lundi matin, devant le tribunal de grande instance. Près de 80 personnes se sont réunies pour marquer leur soutien à Elisabeth Casan : la Bedousienne était convoquée à Pau pour une « procédure de composition pénale ». Au travers de celle-ci, le procureur a proposé une sanction à l’Aspoise, après une poursuite engagée pour « entrave à la circulation » des camions.
Les faits se sont déroulés au début du mois de septembre, lors d’une manifestation organisée par le mouvement anti-camions après l’accident mortel survenu le 27 août devant le fort du Portalet. Au cours de ce rassemblement organisé au rond-point d’Accous, une trentaine de personnes s’étaient placées sur la voie de circulation pour bloquer les camions. « On m’a demandé de me rendre à la gendarmerie de Bedous le lendemain parce que j’avais posé une nappe de pique-nique et un panier sur la route. J’ai été la seule à être convoquée ce jour-là », précise Elisabeth Casan. Avant de pénétrer à l’intérieur du tribunal, l’Aspoise n’est « pas stressée, mais en colère. S’il y a la moindre sanction, je n’hésiterai pas à faire appel. »
« Je n’accepte pas cette sanction »
Elisabeth Casan a été reçue par le délégué du procureur, qui a proposé à l’Aspoise de payer une amende de 200 €. « Je lui ai dit que je n’acceptais pas cette sanction, et que j’irai jusqu’au bout », explique l’Aspoise au terme de son entretien. « Je vais être signifiée à une audience publique. Cela me donnera l’occasion de m’expliquer et de parler du combat du collectif. »
« Ce n’est pas Elisabeth qui doit être pointée du doigt, mais le défaut de protection des habitants de la vallée d’Aspe. Il faut avant tout veiller à assurer la sécurité des Aspois et de l’environnement », explique Me Jean-François Blanco, son avocat.
Elisabeth Casan ayant refusé l’amende, un nouveau procès se déroulera dans le courant de l’année 2019. Jean-François Blanco soulève « un problème juridique : la commune de Borce a pris un arrêté interdisant la circulation des camions le 30 août dernier. Ce dernier, qui n’a pas été attaqué par le préfet, fait partie de l’ordonnancement juridique : on ne peut pas poursuivre les habitants pour entrave à la circulation de camions qui n’ont pas à circuler sur cette route en raison de l’arrêté ».
Le 12 décembre prochain, deux autres militants comparaîtront eux aussi en « reconnaissance préalable de culpabilité », après l’opération escargot organisée à la fin du mois de septembre à Oloron. Comme à Elisabeth Casan, une peine sera proposée à ces deux personnes : elles auront le choix de l’accepter ou non. « Le choix de la préfecture, c’est de ne pas apporter de solution en vallée d’Aspe, mais d’engager des poursuites », s’étonne Jean-François Blanco.
« Une procédure pour intimider »
« Cette mobilisation citoyenne importante marque l’inquiétude des gens face à un trafic de poids lourds totalement inadapté à la montagne », estime la maire d’Etsaut Elisabeth Médard. « La réponse qui est faite à ce mouvement pacifiste me semble disproportionnée. »Pour l’ex-maire adjoint de Borce Didier Bayens, « la procédure qui vise Elisabeth Casan a clairement été mise en place pour essayer d’intimider les gens et les dissuader de venir manifester. Le mouvement n’est pourtant pas un acte de rébellion, mais vise plutôt à protéger la population et l’environnement du risque que comporte le transport de matières dangereuses ».
« La milice anti-ours n’a pas subi de sanction »
Devant les 80 personnes venues soutenir Elisabeth Casan, Jean-François Blanco a évoqué une « justice à double vitesse » : « La milice anti-ours n’a pas hésité à occuper la voie publique, armes à la main, à arrêter et fouiller des véhicules à Sarrance dans la nuit du 3 au 4 octobre, et nous n’avons pourtant pas entendu parler d’action de la part du procureur de la République. Nous sommes clairement devant une justice à géométrie variable, en fonction de la cause défendue. C’est pour cette raison que nous avons refusé le principe de la sanction. » Et l’avocat d’Elisabeth Casan de conclure : « Le 17 novembre est prévu un mouvement pour paralyser les villes afin de contester la hausse des prix du diesel : on s’achemine donc vers un grand nombre d’entraves à la circulation. J’attends de voir si Madame le procureur va engager autant de poursuites à l’encontre des personnes qui s’apprêtent à paralyser les routes… »